Plus de 51 000 étudiants, 6 établissements d’enseignement supérieur répartis sur 2 régions, la Franche-Comté et la Bourgogne, tel est le périmètre qu’embrassera la Communauté d’universités et établissements à laquelle l’UTBM appartiendra désormais. Pas de fusion ici, le regroupement s’inscrit dans la même philosophie que le PRES qui l’a précédé : la création d’un niveau d’organisation supplémentaire qui portera certaines compétences au nom de tous, notamment les projets de site.
L’entrée de l’UTBM dans cette COMUE (Communauté d’universités et établissements), baptisée Université Bourgogne-Franche-Comté (UBFC), a été officiellement adoptée en Conseil d’administration le 7 février dernier. Pour autant, les contours de cette nouvelle forme de regroupement, à tout le moins son périmètre, avaient déjà été dessinés au sein du PRES (pôle de recherche et d’enseignement supérieur). Avec déjà ce qui était l’une de ses particularités, l’union des établissements de deux régions.
La question de « suivre » ou non ne s’est pas posée pour l’UTBM. D’abord parce que ces processus de regroupements, inscrits dans la loi ESR1, sont désormais inéluctables contrairement aux PRES qui n’étaient, eux, qu’encouragés (). Ensuite parce que cette fédération d’établissements doit permettre de mutualiser des ressources et des moyens, d’améliorer la visibilité et l’attractivité de tous et de donner plus de poids à l’ensemble, notamment lorsqu’il s’agit de négocier avec le ministère, en particulier pour des projets de site, scientifiques ou immobiliers.
Veiller à préserver les voix des Universités de Technologie et des écoles
Si l’entrée dans un nouveau processus de regroupement était donc incontournable, l’établissement ne voulait pas pour autant « rater » celle-ci. En plus de contribuer à choisir la forme parmi les trois options qu’offre la loi, celle d’une COMUE, il s’est donc attaché à négocier les bases d’un regroupement qui ne lui soit pas défavorable. Un premier travail indispensable, selon Florence Bazzaro, l’un des membres du groupe de travail consacré à sa mise en œuvre. Car, explique-t-elle, « si l’on se fie aux effectifs que rassemble cette Communauté, les quelque 2500 étudiants de l’UTBM ne semblent pas faire le poids face aux 27 000 de l’université de Bourgogne et aux 21 000 que compte l’UFC ! ».
Ce groupe de travail, composé de trois personnes (lire l’encadré 2), a donc veillé, depuis le début de l’année, à équilibrer les forces. Car, certes, « c’est une petite structure », « mais une structure qui marche ! », plaide Paulin Chevillon, un autre membre du groupe de travail. « C’est pour éviter de se faire ‘manger’ dans ce regroupement géant que nous avons voulu être proactifs. » Tout ce qui a pu être progressivement gagné a donc été inscrit dans les statuts de cette COMUE, qui ont été présentés une première fois au CA le 6 juin dernier avant d’être adoptés le 18 juillet. « Nous devions trancher par exemple sur le nombre de sièges à accorder à chaque membre dans les instances et définir précisément leur rôle au sein de ces conseils », précise Florence Bazzaro. « Nous avons voulu un fonctionnement le plus démocratique possible, en défendant notamment la représentativité des organisations professionnelles et syndicales, des professionnels et des collectivités. » Les négociations ont ainsi permis de faire en sorte que les représentants des petits structures soient bien positionnés sur les listes pour avoir plus de chances d’être élus et que les villes du Nord Franche-Comté bénéficient d’une bonne représentation.
Doctorats et publications scientifiques sous le sceau UBFC
Les établissements se sont également mis d’accord sur le « contenu » de cette nouvelle structure, en définissant les compétences à transférer à cette dernière, ainsi que celles qui feront l’objet d’une coordination interétablissements, et ce, dans tous les domaines : formation, insertion professionnelle, vie étudiante, stratégie de site, recherche et valorisation.
Du PRES à la COMUE, un pas de plus pour l'UTBM
Pendant longtemps les universités ont « marché » pour elles. Il y avait certes quelques velléités très locales de regroupement et de mutualisation autour de certains services. Mais les premiers vrais regroupements se sont faits sur incitation ministérielle, dès 2006, donnant ainsi naissance aux PRES (Pôles de recherche et d’enseignement supérieur). La loi sur l’enseignement supérieur et la recherche (ESR ) adoptée en juillet 2013, n’invite plus mais impose aux établissements de se regrouper pour conduire en commun au moins le volet dit de « coordination territoriale ». La loi créé ainsi un nouveau niveau d’organisation, au-dessus des universités et qui fonctionne sur le même modèle que celles-ci.
Si les établissements de Franche-Comté et de Bourgogne ont opté pour « le mode fédéral », deux autres options ont été offertes aux établissements : la fusion ou l’association à un EPCSCP (établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel) d’établissements ou organismes publics ou privés, concourant aux missions du service public.
La gouvernance d’une COMUE inclut un président et un conseil d’administration assisté d’un conseil académique et d’un conseil des membres. L’UTBM fera évidemment partie des instances décisionnelles de la COMUE. En plus d’un siège au CA et autant au Conseil académique (CAC), comme tous les autres membres, l’établissement espère gagner d’autres sièges via les élections qui seront organisées courant 2015 et qui compléteront le CA de 24 autres membres et le CAC de 60 autres représentants. S’y ajouteront respectivement 14 et 12 personnalités extérieures.
Six établissements composent pour l’instant l’UBFC : les universités de Bourgogne et de Franche-Comté, l’UTBM, l’ENSMM (École Nationale Supérieure de Mécanique et des Microtechniques), Agrosup Dijon et l’ESC Dijon.
Ainsi, dans les domaines de la formation et de la recherche, la COMUE récupérera notamment l’organisation des études doctorales. Le diplôme de docteur seradélivré sous un sceau commun UBFC, tout comme l’habilitation à diriger des recherches. Les établissements ont aussi décidé de transférer à la Communauté la dotation de fonctionnement des laboratoires et de lui confier la ventilation de cette enveloppe. Les publications porteront également une signature scientifique commune. Enfin, les établissements se sont engagés à travailler en cohérence sur la définition des thématiques de recherche et souhaitent constituer un pôle d’édition unique pour les publications.
Autre volet important, c’est à la COMUE que sera confiée la préparation du projet commun de stratégie de site. Le contrat quinquennal de l’UTBM se divisera donc entre un projet commun UBFC et un volet qui lui sera propre.
Une formation et un diplôme d’ingénieur totalement préservés
Le groupe de travail de l'UTBM
– Florence Bazzaro, maître de conférence, élue au CA et chargée de mission handicap
– Sophie Chauveau, professeur des universités, directrice à la recherche et aux études doctorales et élue au CEVU
– Paulin Chevillon, Ingénieur de recherche, élu au CA, représentant à ce titre les personnels de bibliothèque, ingénieurs, administratifs, techniciens, sociaux et de santé
La mise en cohérence de la carte des formations, « rationalisation voulue par le ministère », comme le relève Florence Bazzaro, sera elle « coordonnée ». Elle relèvera donc d’une « recherche consensuelle de collaborations, de synergies et d’harmonisations », comme le précisent les statuts. Pour l’UTBM, cette politique n’impactera en aucun cas la formation d’ingénieur et son diplôme habilité par la CTI. En revanche, les établissements seront encouragés à porter davantage de masters en partenariat – ce que fait déjà l’UTBM qui propose 4 masters en partenariat sur les 6 qu’elle offre aujourd’hui -, et ce sera la COMUE, et non plus les établissements, qui portera leur accréditation.
Ce travail autour de l’offre de formation, en lien direct avec la recherche, se fera au sein de pôles disciplinaires, dont certains sont d’ores et déjà en cours de constitution. L’UTBM est ainsi intégrée au projet de pôle d’ingénierie et de management, avec les autres écoles membres. Pôle2 d’autant plus pertinent qu’il permettra de défendre les intérêts des structures plus petites qui porteront ainsi « une vision commune », comme le souligne Florence Bazzaro. En marge de la formation, la mise en commun portera surtout sur les moyens dédiés à l’insertion professionnelle ou encore sur ceux dédiés à l’accès aux ressources documentaires et aux services de restauration. L’un des premiers projets concerne la mise en place d’une carte unique « multi-services ».
Décrocher des financements dans le cadre du programme investissements d’avenir
Enfin, le regroupement permettra de se positionner plus facilement sur le deuxième programme ministériel d’investissements d’avenir. La COMUE travaille d’ores et déjà, avec également le CNRS, l’INSERM, les CHU de Besançon et Dijon et des partenaires économiques, pour poser sa candidature dans le cadre du tout nouveau appel d’offres I-SITE (Initiatives science innovation territoires économie), autour de trois thématiques : territoires, aliments et environnement ; systèmes et matériaux intelligents ; médecine personnalisée et bien-être. L’enjeu n’est pas négligeable puisqu’il y a à la clé des centaines de milliers d’euros de financements annuels à décrocher, sur une période probatoire de quatre ans au terme de laquelle les fonds attribués seront, en fonction du bilan, dévolus définitivement à l’I-SITE.
Les financements pourront être utilisés ensuite dans de nombreux domaines, pour soutenir des projets de recherche, pour le montage de masters Erasmus Mundus ou encore de chaires industrielles par exemples. Si, comme le souligne Sophie Chauveau, la troisième membre du groupe de travail, l’UTBM aura vocation à s’investir dans un premier temps sur la 2e thématique au vu des spécificités et compétences des équipes, nul doute que cela « constituera aussi un levier pour se restructurer, se positionner sur les autres thèmes et redessiner ainsi la carte de la recherche ».
La COMUE devrait donc être très bientôt en ordre de marche. Une fois les statuts approuvés en CNESER3, elle pourrait être officiellement créée durant le premier semestre 2015.
1- Loi relative à l’enseignement supérieur et à la recherche
2- Des composantes des universités, des écoles et des instituts avaient déjà commencé à collaborer en ce sens au sein de l’association Polytechnicum créée en 2010
2- Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche
Crédits
Un article de Camille Pons
Crédits photos : Marc Barral Baron / Samuel Carnovali / UTBM