Coup de chaud sur le cold spray

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C’est une première dans le domaine prometteur de la fabrication additive. La production d’une pièce complexe par projection à froid suivant une technique inédite de programmation du robot manipulateur ouvre des perspectives industrielles majeures. Une innovation portée par Sihao Deng, enseignant-chercheur à l’UTBM (UMR CNRS ICB-LERMPS).

Projeter pour produire

 

C’est la réplique d’une main, et c’est une première. Une main produite par la projection à froid de microscopiques particules de cuivre pur de 0,03 mm de diamètre. Projetées à plus de 600 mètres secondes par un gaz neutre comprimé à 30 bars et détendu dans une buse, elles viennent s’écraser et se conglomérer.

Le concept de projection thermique est né de l’ingénieur suisse Max Ulrich Schoop, dont on raconte qu’il observait ses enfants tirant à la carabine sur le mur de son jardin où les balles de plomb formaient des impacts écrasés. Nous sommes en 1909, il a alors l’idée de revêtements adhérents à partir d’une poudre chauffée. Quelques milliers de kilomètres plus à l’est, c’est en URSS dans les années 80 que la technique de projection est rendue possible à froid – autrement appelée Cold Spray.

Jusqu’alors utilisée pour le revêtement de pièces industrielles dans des domaines comme l’aéronautique, le médical ou les transports, la projection thermique permet d’élaborer un dépôt de matière présentant des propriétés singulières, comme de résistance à l’usure, à la corrosion, au flux thermique ou d’amélioration mécanique de pièces neuves ou à réparer. Projetée à froid, les applications se développent : les innovations réalisées sur les alliages de cuivre permettent par exemple l’amélioration de la conductivité électrique et thermique. Des enjeux majeurs au regard d’un moteur automobile ou d’une turbine à combustion.

« Les applications de revêtement permettaient jusqu’alors un traitement efficace des surfaces. Je me suis demandé comment rendre la projection thermique à froid tout aussi efficace pour la production d’une pièce industrielle en soi-même », sourit Sihao Deng, enseignant-chercheur de l’UTBM au sein de l’Institut Carnot de Bourgogne.

Le challenge est inédit : « imaginez déposer une poignée de sable sur une table sans un faire un tas conique, que chaque grain puisse trouver sa place au sein d’une structure. Que la projection de cuivre à froid permette la production de pièces industrielles de toutes tailles, rentables et produites partout et rapidement », poursuit-il.

Au sein d’une équipe académique mondialement reconnue depuis les années 90 dans le domaine de la fabrication additive basée sur ces procédés et pour des pièces à géométrie complexes et à forte valeur ajoutée, un programme de recherche est mis en œuvre.

Une programmation dédiée

 

Le bras qui produira cette première sera celui d’un robot : les gestes doivent être précis, fonctions d’une stratégie et d’une technicité ultimes dans la maitrise des paramètres cinématiques : maitrise de la distance entre le robot et le support, angle de projection optimal pour ne pas dégrader la compacité de la matière déposée, vitesse de balayage, trajectoire fidèle à la stratégie de dépôt, couche par couche, millimètre par millimètre. D’abord le centre, puis les bords, enfin les trajectoires de transition entre les zones.

La chaine numérique permettant cette production est totalement innovante. Au bout du bras robotisé, à l’image du cerveau, une programmation sur les bases d’un logiciel de conception et fabrication assistées par ordinateur.

« Nous avons travaillé sur des extensions logicielles spécifiques à la projection thermique, permettant la programmation du robot et la définition automatique de trajectoire par le biais de génération d’algorithmes propres à chaque couche déposée. Aujourd’hui, la production de la pièce est possible à partir d’un simple fichier de CAO, sans étape complexe et longue intermédiaire. Nous poursuivons le développement de nouveaux modules dédiés à la projection à froid », souligne Sihao Deng.

Si la main a vu le jour en un peu plus d’une heure, l’histoire ne fait que commencer pour cet ancien doctorant de l’UTBM en robotique industrielle dédiée à la projection thermique. « Le rendement de matière de plus de 90%, la rapidité et le coût de production de pièces ouvrent aux industriels des champs de développements majeurs pour la production ou la réparation de pièces industrielles, sans limite de dimension et sans recours à des atmosphères protectrices ».

Une première dans le domaine de la fabrication additive. Une fierté pour l’Université de Technologie de Belfort-Montbéliard et ses partenaires industriels. 

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