Stéphane Galland met les Flandres en boîte

Comment simuler puis tenter de prévoir les habitudes de mobilité de quelque 4 millions de Belges ? C’est à cette question fort simple que Stéphane Galland tente aujourd’hui de répondre. Et comme on l’imagine, les réponses sont singulièrement plus complexes…

Chercheur et maître de conférences au laboratoire IRTES-SeT (Systèmes et Transports), Stéphane Galland est spécialisé en intelligence artificielle, particulièrement dans la simulation de systèmes multiagents permettant notamment de modéliser des comportements complexes tant au niveau des individus que des groupes d’individus. Ces travaux s’appliquent parfaitement aux problématiques de trafic et de mobilité, la modélisation et la simulation orientée-agent offrant alors une aide précieuse à  la prise de décision relative à l’aménagement des infrastructures et la conception des réseaux de transport par exemple.

Une aide à la décision

L’enseignant-chercheur a ainsi été partie prenante, dès 2006, des toutes premières phases d’élaboration du plan de déplacements urbains de Belfort, Optimo. « Nous avions modélisé les réseaux routiers et de transport en commun afin servir de base à la reproduction par la simulation des comportements individuels de déplacement, en considérant les interactions entre les usagers et entre les usagers et les bus », explique Stéphane Galland. « Il s’agissait d’usagers des transports en commun, d’automobilistes, et de piétons, qui évoluent chacun différemment selon leurs modes de transport, leurs horaires de déplacement. L’objectif ayant été de formaliser et calculer un certain nombre d’indicateurs transmis aux décideurs afin d’aider ceux-ci à quantifier et évaluer la qualité du réseau de transport en commun».

A la dimension supérieure

Cette simulation, matérialisée par une reproduction de la ville de Belfort, en partie due à la société Voxelia, avait ainsi permis de valider des choix de la société de transports, et d’en ajuster d’autres. Certains indicateurs, comme les temps d’attente aux arrêts de bus, les distances moyennes parcourues, et la couverture précise de la population par le réseau, ont été proposés. Les modèles de simulation réalisés ponctuellement sur des modèles en 3 dimensions ont également mis en avant les difficultés de passage des bus à certains carrefours.DSC_0880

Stéphane Galland applique ces travaux désormais à l’échelle supérieure, et pour cause : il ne s’agit plus maintenant d’une ville, mais de la moitié d’un pays ! A savoir les Flandres belges. Le chercheur de l’UTBM est en effet engagé dans un projet mené avec l’université de Hasselt, visant à comprendre les mécanismes de mobilité des quatre millions d’habitants de cette région de 13500 km2. En prenant en compte les propriétés et les préférences individuelles, les objectifs de la simulation sont de prévoir les encombrements, connaître les besoins en places de stationnement, anticiper les difficultés d’accès aux bassins d’emploi, aux centres commerciaux ou de loisirs…

Mieux comprendre les comportements de mobilité

« En fait », poursuit Stéphane Galland, « nous alimentons nos logiciels avec les données recueillies lors d’enquêtes réalisées auprès des habitants. Ces données sont extrapolées afin de créer une population synthétique, ou artificielle, représentant chaque individu de la région considérée. Grâce à la simulation des interactions et des déplacements entre ces individus virtuels, nous sommes capables de mettre des problèmes en évidence de façon assez précise. Par exemple, nous voulions savoir pour quelles raisons le covoiturage n’est pas une pratique de mobilité plus prisée par la population des Flandres. Les premiers éléments de réponse semblent indiquer que l’usage important d’autres modes de transport (vélos, marche à pied, transport en commun), les différences dans les profils des usagers (centres d’intérêts, etc.), les incompatibilités spatiales et temporelles nuisent à la généralisation du covoiturage à l’échelle des Flandres. De plus, nous voulions déterminer l’influence des activités quotidiennes des usagers sur leurs comportements de choix des modes de transport, et plus particulièrement le covoiturage, et l’impact de ces activités sur la constitution des groupes de covoiturage… ».

Credits
Un article de Serge Lacroix
Photos : UTBM /DR