Portrait : Fei Gao : H comme Hydrogène et Histoire(s)

Côté cours – H comme Hydrogène

Originaire de Pékin, Fei Gao représente aujourd’hui un excellent « condensé » de l’UTBM. Jusque dans sa spécialisation recherche puisqu’il a choisi le thème de la pile à combustible dès sa thèse, obtenue ici en 2010. Des travaux pour lesquels l’UTBM commence à bien se faire connaître. À 30 ans, cet enseignant-chercheur aligne déjà de nombreuses publications et des responsabilités étendues au niveau national et international.

L’invitation ne pouvait se refuser. Quand Fei Gao nous accueille sur le site de Belfort, c’est avec un Segway TP qu’il nous propose de visiter les locaux. Pour ceux qui ne connaissent pas le nom – comme moi – il s’agit de véhicules électriques monoplaces constitués d’une plate-forme munie de deux roues, sur laquelle l’utilisateur se tient debout, et qui répond juste à la position du corps. Véhicules que l’on utilise en France surtout comme engins de balade touristique mais également prisés, notamment aux États-Unis, par des personnels qui effectuent des rondes de sécurité en zones urbaines, ou encore utilisés dans des centres commerciaux et des hôpitaux.

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Aussi ludique soit-elle, la visite débute par la découverte d’un des objets de recherche de Fei. Car ce drôle de « canasson » électrique a été repensé, avec ses élèves ingénieurs à qui il donne des cours entre la 3e et la 5e année de cursus ingénieur, pour y accueillir une pile à combustible afin d’en doubler l’autonomie. Approche assez logique pour ce chercheur devenu spécialiste de la pile depuis qu’il a préparé son doctorat, après l’obtention de son diplôme d’ingénieur en 2007 à l’UTBM.

Côté pile depuis 2008…

La pile occupe en effet la majeure partie de ses recherches, qu’il mène au sein de l’IRTES-SET. Il réalise surtout des modélisations pour des applications en temps réel, donc des émulations. Des travaux qui « consistent à modéliser les comportements d’une pile, sans en utiliser une vraie, explique Fei Gao. La méthode permet d’analyser le fonctionnement et de prédire éventuellement le vieillissement de cette dernière, tout en réduisant les coûts pour tester ce système qui pourra être utilisé notamment dans des applications de transport ».

La démarche est au cœur des travaux qu’il doit mener sur trois ans avec la Région Franche-Comté. Dans le même domaine, Fei a contribué à divers autres projets industriels, avec Alstom, General Electric ou encore Valéo.

Pas d’histoire, tu feras des sciences !

Pourtant, ses premières amours, tous sens confondus, ne le prédestinaient pas aux études d’ingénieur, encore moins à la pile. C’est l’histoire qui le « branche » à son entrée au lycée. Choisie en spécialisation, avec la littérature et la géo, dès sa première année de lycée. « Pour suivre la fille que j’aimais ! », confie-t-il amusé. Résultat, il accroche autant à la matière qu’à sa « muse » de départ, et l’histoire restera d’ailleurs l’une de ses passions.

« Comme je ne détestais pas les maths et l’informatique, et que les chiffres ne me donnaient pas mal à la tête, j’ai choisi des études scientifiques. »

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Alors pourquoi n’avoir pas fait des études en lien avec l’histoire ? « Mes parents m’ont persuadé que je ne gagnerais pas ma vie et qu’il fallait que je fasse des études scientifiques. Mais je sais aujourd’hui que ce n’est pas vrai ! (Rires). Mais comme je ne détestais pas les maths et l’informatique, et que les chiffres ne me donnaient pas mal à la tête, j’ai choisi des études scientifiques. »

Heureuse décision en tout cas pour l’UTBM, qui récupère un chercheur de haut niveau et

super motivé. Issu de l’un des deux meilleurs lycées de Pékin et retenu dans l’une des meilleures universités de la capitale chinoise après avoir décroché l’équivalent du bac S français, il se retrouve aussi sélectionné pour venir faire ses études à l’UT dans le cadre d’une convention qui liait à l’époque les ministères de l’enseignement supérieur chinois et français.

Plutôt trois fois qu’une…

Le jeune homme s’y révélera brillant. À trente ans, Fei cumule bons résultats, prix et responsabilités croissantes. Et le chiffre trois semble un minimum quand il s’agit de récompenses, de victoires ou de réussites. Il a déjà été trois fois récompensé pour ses travaux et publications : après avoir décroché deux « Best paper award », dont un dès la thèse en 2009 et un autre en 2012, il reçoit le prix de jeune docteur en 2011. Il obtient ensuite le droit de devenir maître de conférences (MCF) en se qualifiant dans trois sections de la CNU*, en génie électrique, en génie informatique et automatique et en génie énergétique, un fait plutôt rarissime. Il finit enfin trois fois premier sur des postes de recrutement de MCF et choisi d’intégrer l’UTBM en 2011, au détriment des universités de Paris-Est Créteil et de Franche-Comté.

Aujourd’hui, Fei Gao prend aussi des responsabilités grandissantes au plan national et international. Membre de plusieurs comités fei_gao_cote_cours (7)d’organisation de conférences internationales, il est devenu, depuis mars 2012, animateur de l’axe scientifique « modélisation, expérimentation, émulation de piles à combustible » au sein de la fédération de recherche FC LAB.

En plus d’être invité dans des établissements étrangers, aux États-Unis, à la Colorado School of Mines–Colorado Fuel Cell Center, et en Chine, à la Northwestern Polytechnical University de Xi’an, il prend une part active dans l’association internationale IEEE*, le plus grand regroupement de chercheurs en électronique et électrotechnique. Éditeur associé de la « IEEE Transportation Electrification Newsletter » depuis septembre et secrétaire élu du « IEEE IES Automotive Technology Committee » depuis octobre, il est promis à la vice-présidence de ce comité dès 2015, puis à la présidence deux ans plus tard. Il contribue déjà, en tant que membre du comité d’organisation d’IEEE IECON et d’IEEE ITEC, à organiser une partie des conférences internationales. Avec, en ligne de mire, l’organisation à l’UTBM cette année de l’une de ces rencontres d’IEEE qui sera consacrée à l’électrification des transports. Un rendez-vous à ne pas manquer en octobre prochain…

 * Conseil national des universités. La section 61 couvre le génie informatique, automatique et traitement du signal, la 62e, l’énergétique et le génie des procédés et la 63e le génie électrique, électronique, photonique et systèmes
* Institute of Electrical and Electronics Engineers

Côté jardin – H comme Histoire(s)

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Des passions ? L’histoire antique de la Mésopotamie, de la Chine et de l’Égypte. Je lis régulièrement des livres que je me fais envoyer de Chine par colis, et des rapports de chercheurs sur ces thèmes. La programmation est une autre passion. Je peux passer des nuits blanches à programmer, en langage C et Visual Basic notamment, pour concevoir des jeux d’aventures, avec des amis répartis aux quatre coins du monde. Jeux avec des personnages de mangas, où l’on tue des démons et des méchants !

Qu’est-ce qui vous fascine dans ces pays et ces périodes ?
Dès la fin du primaire, j’ai eu l’occasion de visiter de grands sites en Chine. Notamment la capitale de la dynastie Shang, non loin de Pékin. Je serais resté des mois à admirer ces ruines et à imaginer ce qui s’y était passé, comment son roi et les hommes y vivaient. J’aime le poids de l’histoire, le combat que l’homme a pu mener pour écrire l’histoire, imaginer comment les gens ont été à l’origine d’une civilisation, d’où mes préférences pour l’Antiquité, le Moyen-Âge et la Renaissance étant trop récents à mon goût !

 « Quand d’autres vont au café en attendant de reprendre leur train, moi je suis au musée »

Des passions faciles à assouvir ?
Chaque fois que je vais à Paris, je vais au Louvre. Quand d’autres vont au café en attendant de reprendre leur train, moi je suis au musée. J’y suis allé au moins vingt fois ! C’est magique parce que je vais toujours au même endroit et je découvre chaque fois des choses différentes. J’adore redécouvrir l’originale du code de Hammurabi, l’un des premiers textes juridiques humains qui date de 1750 avant Jésus Christ. Chez moi, j’ai des rayons entiers de bouquins consacrés à ces histoires.

Aujourd’hui je rêve d’aller en Irak, à Ninive ou à Babylone [qui comptent parmi les plus anciennes cités de Mésopotamie, NDLR] mais je ne peux pas car c’est une zone très instable. Je n’ai pas pu aller en Égypte non plus, mais ma mère m’a ramené un manuscrit avec mon nom écrit en égyptien ancien. Du coup, je vais en Turquie en juin, visiter des sites troglodytes.

Les jeux vidéo, ça date de quand ?fei_gao_cote_jardin (2)J’ai commencé à faire de la programmation à l’école primaire et créé mon premier jeu à 9 ans. J’avais la chance, ce qui était rare en Chine à l’époque, d’avoir un ordinateur récent tous les deux ans. J’ai gardé mon cahier avec la conception manuscrite et graphique de la première histoire que j’ai conçue, un vrai trésor ! Et l’un des jeux programmés ensuite avec mes amis en 2008, a même été vendu. Enfin, j’adore jouer en réseau, notamment au fameux jeu « World of Warcraft ».

Vous y jouez beaucoup ?
Quand je préparais ma thèse, j’y jouais quasiment toutes les nuits. Maintenant j’y joue au moins trois fois par semaine – je dirige une équipe de « raid » dans World of Warcraft ! – et je peux tenir jusqu’à 3h du matin !

Entre vos recherches, les heures d’enseignement et vos passions, vous arrivez à dormir ?
Oui ! (Rires) Mais ça dépend. J’arrive à dormir la plupart du temps au moins 7h. Et j’aime lire aussi, quand j’ai le temps, la dernière version de la bible que j’ai trouvée…

Crédits

Un article de Camille Pons
Crédits photos : Daniel Nowak

  

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