L’entrepreneuriat et l’amitié à très haut débit et à 3D

Côté cour – Les spécialistes

L’un a plutôt la fibre commerciale, l’autre maîtrise la technique, le troisième aime à gérer l’organisation et la com’. Ils sont des copains d’abord. Qui se sont rencontrés sur les bancs de l’UTBM d’où ils sont sortis entre 2005 et 2007. Ils ont imaginé la création d’entreprise à 3D : trois diplômés qui ont monté en 2008 une société, devenue opérateur local dédiée aux professionnels et aux collectivités. Ils « carburent » et sont toujours amis…

Ce sont des copains de promo. Ils ont partagé les bancs de l’UTBM, partagé la résidence universitaire puis des apparts, trinaps_cote_pro_details (6)fait des soirées étudiantes, des voyages ensemble, ils ont créé à trois l’association de promo, des événements à l’instar du tournoi sportif inter UT, et des clubs, avant de récupérer la gestion de l’Association étudiante en dernière année… Ces projets leur ont donné le goût d’entreprendre encore ensemble. Surtout qu’à l’époque, « pas d’argent, pas de femmes, nous pouvions prendre des risques ! », résume en s’amusant Florian Féry, l’un des trois associés. « Et vu que nous nous étions bien fait plaisir à l’AE, nous trouvions dommage de rentrer dans le monde du travail séparément ! »

Maintenant ils se partagent une société, sur Techn’hom à Belfort, Trinaps, spécialisée en ingénierie réseaux et télécoms. Alors qu’ils se sont lancés avec un capital de 48 000 euros, ils réalisent aujourd’hui un chiffre d’affaires d’un million d’euros. Leur créneau, qui les rend quasi-uniques en Franche-Comté : proposer en propre des accès internet fibre optique et xDSL, et de la téléphonie, au-delà du wifi qui fut leur première entrée dans l’activité, en vendant le service mais aussi les « tuyaux » en développant leur propre infrastructure, et ce, exclusivement à des entreprises et des collectivités. Et en visant en priorité le marché local.

Un ciblage qui réussit à ces « férus de technologie », comme aime à qualifier le trio Fabien Hazebroucq, un autre des associés. D’abord parce qu’en Franche-Comté les petits opérateurs « alternatifs » se comptent sur les doigts d’une main. Ensuite parce qu’en choisissant de privilégier « la qualité en petite quantité au détriment du volume en low cost », ils ont pu développer « une grande proximité avec les clients », analyse Fabien. « Ici, ils ne sont pas des matricules ! »

« Les structures d’accompagnement voulaient un leader version old school, un seul chef et non trois ! »

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La complémentarité pour pouvoir diriger à trois

Si évidemment les trois amis ont des points communs qui les ont unis jusque dans leur vie professionnelle, ils ont su aussi se répartir les missions en fonction de leurs différents profils, tout en gardant « la volonté de diriger à trois ». Gauthier Douchet, diplômé en filière informatique et spécialisé en réseaux et télécoms, est le président et le directeur technique de la société. Il gère l’outil de production, l’infrastructure, les projets et la partie financière. Florian Fery, diplômé en génie informatique et logiciel, est le directeur commercial. C’est lui qui gère le réseau de clients et définit la stratégie commerciale de l’entreprise. Fabien Hazebroucq, diplômé en génie des systèmes de production, est le directeur administratif et responsable des fonctions supports. Il gère autant l’organisation, la démarche qualité, que la logistique et la communication. « C’est marrant cette complémentarité », s’amuse ce dernier. « On nous l’a d’ailleurs beaucoup reproché au départ. Les structures d’accompagnement voulaient un leader version old school, un seul chef et non trois ! » Mais en s’immergeant dans un secteur de technologie innovante, identifier différents « chefs » pour « des responsabilités plus diffuses sur le terrain », va s’avérer au final porteur…

Pourquoi Trinaps ?

On s’en doute un peu, « tri » est le clin d’œil donné au trio gagnant qui a créé la société. Le suffixe « naps » fait référence de son côté aux synapses qui permettent les échanges d’informations entre les neurones du cerveau, même lorsque les cellules ne se touchent pas : ce sont en quelque sorte les connexions « sans fil » qui se font dans le cerveau. Or, les trois diplômés ont démarré leur activité en proposant une couverture wifi…


 

De 0 à 210 clients en 7 ans

Alors que la boîte, une SAS, à été créée sans portefeuille clients, elle compte, 7 ans plus tard, plus de 200 clients dont 124 récurrents. Le premier contrat a été décroché auprès de la SEMPAT, la société patrimoniale du Territoire de Belfort. Aujourd’hui, Trinaps compte parmi ses clients des PME, de gros donneurs d’ordre locaux ainsi que l’université de Franche-Comté, et le Conseil général du Territoire de Belfort. Elle est également présente à Besançon, Lyon et Paris et intervient dans des villes comme Dijon, où le Centre des congrès a été équipé en fibre optique et wifi.

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Les associés se sont aussi lancés dans l’événementiel : université d’été du MEDEF, championnat de France de motocross de Villars-sous-Ecot ou encore championnat du monde de triathlon à Belfort… Cette branche de leur activité leur permet en plus d’assouvir certaines de leurs passions. Celle de Gauthier par exemple, fan du ski hors piste. « Nous avons amené du wifi à 2000 mètres d’altitude en Suisse, à l’occasion de l’Xtreme de Verbier, le championnat du monde de freeride, pour permettre la retransmission en direct par les médias », se souvient Fabien. « Et nous étions prêts à grimper plus haut et nous mettre en quatre pour faire la prestation ! » Et ils n’ont pas peur d’avouer être « trop contents d’aller tirer des câbles en shorts pour alimenter le site des Eurockéennes en haut débit ! ».

Moyenne d’âge, 26 ans, et des locaux à leur image

Les trois jeunes de 32 et 33 ans ont aussi voulu une entreprise qui leur ressemble. L’équipe qui compose leur société – ils sont 8 au total auxquels s’ajoutent 2 stagiaires chaque semestre – est jeune, comme eux. « Un profil start-up », comme aime bien la qualifier Fabien, « avec une moyenne d’âge de 26 ans. Et les locaux sont à notre image, toujours en mouvement ! ». Comme l’aménagement qu’ils ont choisi pour cet ancien entrepôt de 200 m2 qui comprend un open space, y compris pour les trois directeurs qui se partagent le même espace, une salle de réunion, une cuisine et un coin « bien-être » avec canapé, TV, plantes et baby-foot !

N’imaginons pas pour autant que c’est un long fleuve tranquille. Fabien s’en souvient, les associés ont connu « des moments difficiles », surtout les trois premières années. « L’une des contraintes du métier d’opérateur est que les charges sont fixes », explique-t-il. « On doit par exemple acheter et remplacer régulièrement les routeurs et les trinaps_cote_cour (8)serveurs, que l’on ait un seul ou plusieurs clients. Il faut donc un peu de temps pour assimiler ces frais. » Florian évoque de son côté « une période de questionnement ». « La deuxième année, nous avons brûlé tout l’argent et nous nous sommes demandés : est-ce qu’on continue ? ».

Mais la patience a porté ses fruits à tel point que la dernière année s’est même soldée « par une croissance folle ». De l’ordre de 70 %… Et qui a nécessité de nouveaux investissements, « pour faire évoluer les infrastructures notamment », précise le troisième co-fondateur, Gauthier. Avec l’objectif aujourd’hui « de devenir le premier opérateur alternatif pour les professionnels et les collectivités dans la région ». Et quelques nouveaux projets à la clé, comme celui d’un data center local, un espace pour héberger les serveurs de leurs clients.

« C’est difficile parfois d’être à la fois associés et amis. Mais quand nous nous retrouvons, nous ne parlons jamais de boulot. Ce qui se passe à Trinaps reste à Trinaps… »

Et le rôle de l’UTBM là-dedans ? La formation évidemment, et l’investissement associatif qui leur a fait goûter au plaisir de la gestion de projet. « Résultat », s’amuse Fabien, « alors que nous sommes tous originaires d’autres régions, nous sommes tous restés grâce à l’UTBM ! »

Et l’amitié dans tout ça, alors que l’on dit souvent qu’elle ne fait pas bon ménage avec le travail ? « Difficile, oui, parfois d’être à la fois associés et amis », concède Fabien. Mais ils suivent une « règle tacite » : « quand nous nous retrouvons, nous ne parlons jamais de boulot. Ce qui se passe à Trinaps reste à Trinaps… » Et au boulot ? « Diriger à trois n’est pas facile non plus ! Mais il y en a toujours deux qui raisonnent le troisième ! Et quand l’un de nous a une baisse de forme, les autres prennent le relais. » De toute façon, confie-t-il, « il n’est pas sûr qu’individuellement nous ayons eu envie de créer ».

Côté jardin – Le bon… vivant, le tireur de portraits et le skieur

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Des passions ?

Gauthier : j’adore le ski hors piste. Que je pratique dans les Alpes suisses, dans la vallée de la Maurienne, où j’ai de la famille, ou encore à Courchevel où j’ai des amis.

Florian : Moi, c’est la photo. De paysage notamment. Même si, depuis que j’ai des enfants, je fais surtout des portraits d’eux. J’aimerais beaucoup me lancer dans l’argentique et avoir mon propre labo. En attendant, j’ai un appareil numérique et l’un de mes plus grands plaisirs, c’est de réaliser des photos en conditions lumineuses difficiles, de créer des ombres chinoises…

Fabien : je ne suis pas un homme de passions, j’ai énormément de centres d’intérêt et je suis un peu touche-à-tout. Comme au boulot où je suis un peu l’homme à tout faire ! En ce moment, je m’adonne au bricolage, sur une vieille maison et une vieille estafette. Et à l’occasion, je fais aussi de la musique, je joue au rugby ou je fais du VTT. Et, j’avoue, j’adore manger. Je suis un bon vivant…

Comment y êtes-vous venus ?trinaps_cote_jardin (16)

Gauthier : j’ai débuté le ski hors piste à 15 ans, d’abord en Savoie. Ce sont mes cousins qui m’ont forcé à en faire ! Comme ils étaient de bon niveau, il a fallu que je rattrape mon retard !
Florian : je fais des paysages et des portraits depuis l’âge de 18 ans. J’aime pouvoir m’arrêter sur un cadre, observer et capter la lumière.

Fabien : j’ai des envies que j’assouvis au fur et à mesure que ça me prend. En ce moment, c’est l’estafette que je veux retaper en conservant le côté vintage. J’ai toujours aimé les vieilles voitures. Et ça me rappelle des souvenirs : quand j’allais en camp, les animateurs nous conduisaient en estafette. Et lorsque j’ai eu mon BAFA, c’est moi qui l’ai conduite !

« On a tous trois femmes ! Celle de la maison et les deux autres au boulot ! »

Facile de les assouvir quand on est patron d’entreprise ?

Gauthier : avant, j’y allais régulièrement les week-ends, mais le pro et le perso me prenant plus de temps – j’ai une fille qui a 2 ans et ma compagne aime moins skier – cette année, j’ai fait juste de la luge et du ski loisir ! Mais on m’a offert pour mon anniversaire une sortie en hélico pour aller me faire du hors piste à la frontière franco-italienne…

trinaps_cote_jardin (15)Florian : plus le temps non plus de faire des photos, je n’en fais que de mes gamins ! Alors que j’avais eu l’occasion d’user mon appareil lorsque j’avais été salarié d’une association spécialisée dans le temps et la mobilité, et amené à voyager avec mon patron en Italie, en Belgique, en Suisse, en Autriche…

Fabien : mon estafette me sert à transporter les plaques de plâtres ou les gravats pour retaper la maison que je viens d’acheter. Je joins l’utile à l’agréable, d’abord utilitaire, puis j’apprendrai la mécanique et la carrosserie pour en faire un véhicule de collection pour amener les copains en pique-nique !

Des grands moments ?

Gauthier : la naissance de nos enfants ! Florian en a deux, moi un et Fabien zéro pour l’instant, mais de temps en temps on les lui prête !

Florian : Et on a tous trois femmes ! Celle de la maison et les deux autres au boulot ! Et ça « frite » parfois, comme dans un couple !

Crédits

Un article de Camille Pons
Crédits photos : Daniel Nowak / DR
  

 

 

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